Réalisation Ariel Laforge
Texte de Christiane Laforge
lu à la présentation de Giuseppe Benedetto
au Gala de l'Ordre du Bleuet, le 7 juin 2014
Né à Reggio di Calabria en 1951, Giuseppe Benedetto quitte le soleil de l’Italie 16 ans plus tard pour s’installer sur la Côte-Nord en compagnie de ses parents. Lycéen en art au pays de la bergamote, l’artiste se tourne inévitablement vers les lieux de formation artistique de Chicoutimi, Jonquière et de Montréal pour atteindre sa maturité.
Bachelier en enseignements des arts de l’Université du Québec à Montréal, il démontre ses talents de sculpteurs dans plusieurs réalisations d’œuvres intégrées à l’architecture, multiplie les expositions en groupe et en solo tout en terminant une maîtrise à l’Université du Québec à Chicoutimi. En 1994, son mémoire, La colonne à travers l’espace-temps et/ou l’imaginaire de la durée, comme son exposition de maîtrise présentée au Centre national d’exposition de Jonquière, traitent des caractéristiques particulières des matériaux tels le verre, le granit, l'argile et le métal. Le souffleur de verre se rapproche inévitablement de la flamme.
À son contact, des élèves de la Polyvalente de La Baie ont été initiés à la sculpture, la peinture, la céramique, l’émail. Le transmetteur du savoir s’affirme de plus en plus.
Giuseppe Benedetto s’est laissé apprivoiser par la terre saguenéenne aussitôt inscrit au Cégep. Amoureux de sa région d’adoption, il la fait sienne et s’installe à La Baie avec l’amour de sa vie, Anne Coulombe sa partenaire de tous les projets, conquis par la puissante beauté du fjord et ses montagnes usées, trop caressées par les vents et le temps. Ce temps, l’essence même du verre et du granit, ces matériaux qu’il utilise. «Ma démarche, écrit-il, s'articule sur une idéologie basée sur l'historicité, le mythe et la symbolique iconographique des objets; objets qui racontent des moments, des idées, des souvenirs. Des objets sujets qui situent l'espace arrêtent la durée. Une durée qui m’apparaît polymorphe. En effet, elle m’apparaît de trois manières différentes, mais complémentaires. L’usure tangible de la matière par le temps et la relative durée des matériaux, parcours et perception de l’espace-temps, conscience du réel, souvenirs et mémoire.»
L’artiste, enseignant lui-même, n’a de cesse de se perfectionner. Il a pour maître Yaromir Ribak de la République tchèque en thermoformage, l’artiste de réputation international Lino Tagliapietra d’Italie en soufflage de verre, François Houdé pour le coulage dans le sable via Espace Verre de Montréal. Il contribue au développement des arts visuels comme membre d’organismes culturels : Conseil de la sculpture du Québec, Musée du fjord de La Baie, Corporation des fêtes du 150e de la région, conseil des Métiers d’art du Québec, conseil régional de la culture. Il organise des marathons de dessins et des symposiums de sculptures, dont celui des monstres marins de La route maritime sur terre initiée par notre maître souffleur lors des activités de Saguenay capitale culturelle du Canada 2010.
Plusieurs fois boursier du ministère des Affaires culturelles, ses œuvres figurent en bonne place parmi des collections publiques et privées de prestige. Elles ont été honorées par plusieurs prix, dont le prix d’excellence des Métiers d’art ou le Prix Hydro-Québec au Gala du mérite économique en 2005.
En 1993, El Americano, comme le surnomment affectueusement ses amis italiens, ouvre son atelier Verrerie d’art Touverre face à la Baie des Ha! Ha!. Dans le cumul des éclats colorés de verre cassé au cours de ses expériences, malheureuses mais nécessaires à l’apprentissage, s’est confortée une maîtrise du médium où les couleurs de l’Italie épousent celle du bleuet sous les formes les plus diverses : béluga, baleine, orque, fruits sauvages, feuilles de bouleau, ou encore les boules de Noël très prisées par les touristes. Même la Société des alcools du Québec a cédé à la tentation de la pomme de verre Benedetto pour la diffusion d’un nouveau cidre de pomme en 2002.
En 2004, répondant aux critères de qualité et d’authenticité de la Société internationale du réseau Économusée (SIRÉ) implanté au Québec, ainsi que dans plusieurs provinces canadiennes et pays du nord de l’Europe, la Verrerie d’art Touverre devenait le premier économusée du Saguenay–Lac-Saint-Jean. Ce réseau regroupe des entreprises artisanales assurant la sauvegarde et la transmission du savoir-faire. Depuis, Giuseppe Benedetto et son collaborateur de longue date Marc-André Gagné ont accueilli de nombreux visiteurs à l’économusée. Dans l’atelier, adjacent à la boutique, ils les initient aux techniques de la soufflerie, leur offrant la possibilité d’expérimenter certaines étapes de soufflage du verre et du polissage de pierres taillées. Une salle d’exposition, aménagée à l’étage propose au regard des objets anciens et contemporains ainsi qu’une imposante collection de créations en verre. S’ajoute un espace dédié à la lecture et à la documentation où l’on peut consulter des ouvrages sur l’art de ce souffleur de verre qui a su rivaliser avec les artisans du bois et de l’aluminium de sa région d’adoption.
Vivant sa vie dans la couleur et la transparence, où les mots barderelle, mailloche et canne sont des objets utiles à sa quête de la forme, Giuseppe Benedetto a traversé un océan avec, dans ses bagages, le talent et la détermination, la créativité et le dévouement, la curiosité et le sens du partage qui rayonnent dans son art et dans son enseignement au feu d’une passion. Il nous a dotés d’un lieu du savoir-faire artistique reconnu. À nous maintenant de savoir dire merci.
Le 7 juin 2014
GIUSEPPE BENEDETTO
Souffleur de verre, sculpteur et fondateur
de l’Économusée Touverre
fut reçu membre de l’Ordre du Bleuet
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vendredi 20 juin 2014
Giuseppe Benedetto sur vidéo au gala 2014
Réalisation Ariel Laforge
POURQUOI L'ORDRE DU BLEUET
L'intensité et la qualité de la vie culturelle et artistique au Saguenay-Lac-Saint-Jean est reconnue bien au-delà de nos frontières. Nos artistes, par leur talent, sont devenus les ambassadeurs d'une terre féconde où cohabitent avec succès toutes les disciplines artistiques. Cet extraordinaire héritage nous le devons à de nombreuses personnes qui ont contribué à l'éclosion, à la formation et au rayonnement de nos artistes et créateurs. La Société de l'Ordre du Bleuet a été fondée pour leurs rendre hommage.La grandeur d'une société se mesure par la diversité et la qualité de ses institutions culturelles. Mais et surtout par sa volonté à reconnaître l'excellence du parcours de ceux et celles qui en sont issus.